Les marques doivent tenter de résoudre une véritable quadrature du cercle. Le paysage culturel français est plus morcelé que jamais. Les subcultures qui émergent en résistance à la culture dominante continuent de se multiplier et de se radicaliser. De plus en plus de consommateurs vivent aujourdâhui dans une « bulle de filtres ». Les nouveaux justiciers dénoncent, accusent et réinventent les codes du militantisme. Les néostalgiques chinent, jardinent, bricolent et jouent pendant des heures sur les vieux Atari 520 et les Commodore 64 de leur enfance. Dâautres vantent les mérites de lâéloge de la fuite. Ces « escape gamers » tentent de se soustraire à une société quâils considèrent illégitime en sâinstallant à la campagne, en réaménagent leur intérieur pour le transformer en cocon protecteur, en écoutant des podcasts dans les transports ou en jouant sur leur console. Et puis il y a les adeptes des « nouveaux cultes » qui sâintéressent aux cryptomonnaies, aux social games et aux influenceurs en tout genre. Deux ans après la publication de sa première étude sur le sujet, lâagence de communication Initiative France vient de publier son nouvel opus sur « lâétat des cultures en France ».
Ces vingt-quatre mois nâont pas été de tout repos. Le Covid-19 nous a contraint à rester cloitrés de longues semaines à nos domiciles. Les musées, les salles de concerts et les cinémas ont été fermés pendant plusieurs mois. Des milliers de festivals ont été annulés. Cette période sans précédent nâa pourtant pas « révolutionné » notre rapport à la culture.
Les tendances s’accélèrent
« Nous nâavions pas connu une telle pandémie depuis plus dâun siècle mais si cet événement a eu un impact sur lâévolution des cultures en France, elle a surtout accéléré des tendances qui étaient déjà présentes avant lâarrivée de la pandémie, résume Françoise Fassin, la directrice générale adjointe dâInitiative France en charge des stratégies et du planning. Toutes les préoccupations liées au climat et à ce que nous mettons dans nos assiettes se sont sensiblement développées ces deux dernières années car beaucoup de gens associent la pandémie à la crise écologique mondiale. Lâanti-consumérisme existait également avant lâépidémie comme le prouvait le mouvement des gilets jaunes mais ce phénomène a pris énormément dâampleur en deux ans. »
Pendant de nombreuses années, les marques ne se sont pas vraiment intéressées à ces subcultures. Leur objectif était de parler au plus grand nombre et non pas de chercher à privilégier une niche plutôt quâune autre. De plus en plus dâentreprises comprennent toutefois aujourdâhui quâelles doivent séduire ces groupes pour vendre leurs produits et leur service. Le « mass market » nâest plus un bloc compact mais une myriade de sous-ensembles différents les uns des autres.
Les marques ne se voilent plus la face
« Les marques sâintéressent de plus en plus aux tendances culturelles car elles ont compris que câétait une obligation pour elles, tranche Françoise Fassin. Dans le passé, elles cherchaient à acheter de la couverture et de la fréquence pour assurer leur promotion mais elles doivent de nos jours être pertinentes auprès des cibles quâelles souhaitent toucher. » Cette évolution signerait-elle lâarrêt de mort des marques généralistes, celles qui cherchent à plaire au plus grand nombre et à vendre leurs articles aux consommateurs âgés de 7 à 77 ans ? Françoise Fassin nây croit pas une seconde.
Un patchwork complexe
« Il est toujours possible aujourdâhui dâêtre une marque généraliste, juge cette experte. Il faut juste trouver un message qui soit capable de réunir et de rassembler un maximum de personnes. Mais pour être global, il est nécessaire de bien comprendre toutes les subcultures qui existent. La société sâest archipélisée ces dernières années avec lâapparition de radicalisations de plus en plus extrêmes mais une récente étude dâUsbek & Rica a également montré que 87% des Français affirmaient bien se sentir dans le monde actuel. Les subcultures prouvent que notre société est en bonne santé car pour sâopposer au sens commun comme elles le font, il faut quâil en existe un⦠» C.Q.F.D.
source : www.influencia.net