Comment nous préparer à la mort de la publicité ciblée ?

1 juin 2022

Bien encouragé par le séisme Cambridge Analytica survenu au moment des élections américaines de 2016, Google s’affiche depuis quelques années comme le grand protecteur des données personnelles de ses utilisateurs, en leur offrant notamment toujours plus de latitude pour définir leurs préférences concernant les publicités ciblés auxquelles ils sont exposés et la collecte de leur data. En la matière, AdChoices et plus récemment l’arrivée de Google My Ad Center ont plus que prouvé leur utilité. Une position louable – une fois n’est pas coutume – mais dont la viabilité pose question quand on sait que 80 % des revenus du géant technologique proviennent de la publicité.

Facebook en sait quelque chose. Rappelez-vous : lors de la sortie de son système d’exploitation IOS 14.5, le réseau social avait laissé la possibilité à ses usagers d’accepter ou de refuser le suivi de leurs données par leurs applications favorites. Résultat, 96 % des utilisateurs américains avaient refusé, de quoi entrainer une chute de 60% concernant les ventes attribuables aux publicités personnalisées. Les « bonnes pâtes » prêtes à accepter, sans sourciller, la collecte systématique de leurs cookies, se font de plus en plus rares, au grand dam des régies publicitaires. D’autant que la publicité ciblée ne serait pas aussi efficace que cela. Une étude publiée en juillet 2021 par Adalytics révélait ainsi que 90,5 % des annonces publicitaires de la marque de chaussures Merino avaient été émises aux mauvais destinataires. En l’occurrence, des produits exclusivement féminins avaient été proposés à des utilisateurs masculins. Quand on connait le prix des espaces pub, ça fait chère la boulette.

Un bref rappel des faits

Pour comprendre les enjeux d’un tel revirement idéologique, il est important d’en poser les termes. Les cookies représentent les « traces » numériques d’un identifiant qui permettent à un site web de reconnaître son utilisateur. Sur un site de shopping en ligne, par exemple, ils permettent à la plateforme de se souvenir de ce qu’un utilisateur a mis dans son panier, de son adresse, etc. Initialement, l’idée des cookies était de faciliter l’expérience client afin de proposer du contenu pertinent au consommateur. Leur dérive s’est accélérée au moment de l’apparition des cookies tiers, qui permettent la récolte de données, non pas du site visité, mais du serveur d’un opérateur qui enregistre alors ses données et son chemin sur le Web afin de bâtir son profil utilisateur.

 



 

A la question « pourquoi les cookies vont-ils disparaitre ? », Pascal-Philippe Bergeron, chef d’équipe Science & ingénierie des données pour le compte du cabinet de conseil Adviso, a répondu en ces termes : « Ces dernières années, la collecte massive de données avait peu de limites. Plutôt que de cibler des groupes d’individus, on en arrivait à faire du marketing personnalisé. On peut donc dire que les grands joueurs qui prédominent dans le marché, comme Google, ont pris la décision d’être plus responsables avec les données des utilisateurs ». Si cette nouvelle doctrine cookieless prévue pour 2023, et qui ferait donc table rase de l’usage des cookies tiers, est le moyen pour Google de protéger la vie privée de ses consommateurs, alors My Ad Center est le moyen pour les utilisateurs de limiter les données partagées, telle que leur historique de navigation, avec des agrégateurs de données, des éditeurs et des plateformes tiers. Plus important encore, il avertit les utilisateurs lorsque l’adresse électronique, le numéro de téléphone ou l’adresse du domicile sont suivis par des sites Web. Cela arrive encore régulièrement étant donné que ces informations constituent l’épine dorsale de la segmentation de l’audience par des tiers.

Allons de l’avant

Maintenant que tout cela a été précisé, imaginez un monde où 96 % des utilisateurs choisiraient de ne pas fournir leurs principales informations personnelles. Comment les marketeurs sauraient alors que leur segmentation d’audience est exacte, ou que leur campagne publicitaire a été performante ? Cela va de soi, mais un ciblage précis de sa cible est essentiel à toutes opérations publicitaires. Son absence, provoquée par ces paramètres de ciblage plus stricts, aurait forcément des conséquences néfastes sur le ROI des campagnes et les coûts de la publicité tels que le CPM – Coût Pour Mille impressions –, et le CPC – Coût Par Clic –.

A l’image de ce qui se passe actuellement sur Meta. Le groupe a annoncé en novembre dernier qu’elle ne permettrait plus aux annonceurs de cibler leur audience en se basant sur des sujets dits « sensibles », tels que leur opinion politique, leur couleur de peau ou leur orientation sexuelle. Plus globalement, Meta a annoncé que certaines catégories d’annonceurs signalent actuellement des CPM en haussent de 86 %, car il devient plus difficile pour les annonceurs de pousser les utilisateurs à l’acte d’achat. La seule option « viable » pour les régies publicitaires serait alors d’augmenter leurs investissements, de quoi les amener à se livrer une concurrence acharnée pour un seul et même utilisateur.

 

 

Comment rebondir ?

Concernant l’impact que la disparition de la publicité ciblée causerait sur le long terme aux agences publicitaires et aux professionnels du marketing, Pascal-Philippe Bergeron, toujours lui, expliquait que, bien évidemment : « la capacité à marchander va diminuer. Le ciblage direct entre un utilisateur et un site va être maintenu, mais le reciblage de liste de clients va disparaître. C’est stressant pour les compagnies parce que plusieurs de leurs outils utilisaient les cookies tiers. Elles auront dorénavant la responsabilité de collecter elles-mêmes leurs données. Les informations nominatives – adresse courriel, âge, nom, prénom, téléphone, adresse physique, code postal, etc. – vont redevenir une denrée très recherchée, car ces informations transcendent les cookies. Même si elles sont beaucoup moins anonymes que ce qu’offraient les cookies à la base. Mais tout n’est pas négatif. Peut-être observera-t-on une diminution de l’achat programmatique au profit de l’achat local ».

L’autre conséquence possible, et déjà observée, serait de relocaliser les budgets publicitaires sur d’autres plateformes aux réglementations plus « souples ». A ce sujet, l’arrivée de l’IOS 14.5 avait entrainé un regain d’intérêt pour Pinterest, Snapchat ou encore TikTok, jusque-là car moins orientées sur la conversion. Les annonceurs s’étaient montrés prêts à franchir le pas pour essayer d’y trouver la performance perdue sur Facebook. L’autre alternative, que Google préférerait, serait pour les annonceurs de transférer leurs annonces pub vers la plate-forme GoogleAds, où ils pourraient continuer à exploiter les activités et l’historique des utilisateurs de Google pour les cibler à la fois sur et hors plate-forme. Alors que My Ad Center limitera l’accès des sites d’édition tiers à votre historique, Google DV360 et GoogleAds permettraient toujours aux marques de cibler avec précision les utilisateurs du moteur de recherche, qui, au dernier décompte, étaient bien plus nombreux que n’importe quelle base d’utilisateurs dans le monde, soit 4,3 milliards. En bref, tout un tas de questions pratiques et de pistes de réflexions stratégiques demeurent d’actualité… et en tant que professionnels du marketing et de la communication, nous avons hâte d’en connaitre les résolutions. De quoi nous tenir en haleine jusqu’à 2023.

 



 

En résumé

Comment les régies publicitaires et les annonceurs peuvent-ils se préparer à la disparition programmée de l’usage des cookies tiers ?





source : www.influencia.net

agence de communication à Rennes

Comment nous préparer à la mort de la publicité ciblée ?
Mot clé :                    
Agence LDP